Les ganivelles, barrières discrètes pour une nature protégée

Par Lei BRUSCADOU

Lorsqu’on se promène en bord de mer, on remarque parfois ces petites clôtures en bois plantées dans le sable ou le sol, comme un petit labyrinthe aux allures rustiques. Ce sont des ganivelles, et sous leur apparente simplicité, elles jouent un rôle crucial dans la préservation des espaces naturels fragiles, notamment autour de la lagune du Brusc.

Mais pourquoi les pose-t-on ? Sont-elles vraiment utiles ? Et comment sont-elles perçues par le public ? Petit tour d’horizon d’un outil simple mais redoutablement efficace, que notre association Lei Bruscadou a contribué à installer en 2025 pour protéger la lagune.


Qu’est-ce qu’une ganivelle, exactement ?

Une ganivelle est une clôture faite de lattes de bois verticales, souvent du châtaignier, reliées entre elles par des fils de fer. Traditionnellement utilisées pour fixer les dunes sur les plages atlantiques, elles sont aujourd’hui aussi largement adoptées en milieu méditerranéen, notamment pour canaliser les flux de visiteurs dans les zones sensibles.

Elles permettent de délimiter des zones de passage, protéger des herbiers marins, empêcher le piétinement des sols fragiles, et rappeler discrètement mais fermement les règles de circulation.


Pourquoi en installer au bord de la lagune du Brusc ?

La lagune du Brusc est un écrin de biodiversité exceptionnel, mais aussi un espace très prisé par les touristes. Avec l’essor des loisirs nautiques, notamment du kayak et du paddle, la pression humaine a fortement augmenté ces dernières années.

Depuis 2014, date à laquelle l’usage du paddle a été officiellement autorisé sur la lagune, cette activité s’est démocratisée à vitesse grand V :

  • Les paddles sont aujourd’hui peu coûteux (environ 200 €)
  • Ils sont gonflables, donc faciles à transporter et à stocker
  • Les moteurs électriques de gonflage les rendent accessibles à tous, sans effort
  • Les loueurs se sont multipliés, augmentant encore la fréquentation

Résultat : de nombreux pratiquants mettent leur embarcation à l’eau directement depuis les parkings, sans respecter les zones prévues pour la mise à l’eau comme les pontons. Cela entraîne :

  • Le piétinement des berges et des herbiers fragiles
  • L’érosion des sols
  • Une dégradation de l’expérience de visite pour tous
  • Et une pression directe sur la faune, notamment les hippocampes qui vivent dans les herbiers proches des rives

La solution : canaliser sans interdire

Face à cette situation, notre association Lei Bruscadou a proposé une réponse équilibrée : installer des ganivelles à des points stratégiques, notamment à la sortie des parkings.

Objectif : rendre impossible la mise à l’eau sauvage, sans avoir recours à des barrières rigides ou des interdictions brutales. Ces ganivelles orientent le public vers les zones autorisées, notamment les pontons aménagés, où la mise à l’eau se fait sans nuire aux habitats naturels.

C’est une mesure douce mais claire, que nous avons pu mettre en œuvre en concertation avec la mairie, qui a accepté de soutenir et de mettre en place ce dispositif en 2025.


Et l’acceptation par le public ?

Au départ, comme toute nouvelle mesure, les ganivelles ont suscité quelques interrogations :

  • « Pourquoi on ne peut plus passer ici ? »
  • « C’est juste un paddle, je ne vois pas le problème… »
  • « On est en vacances, on veut juste profiter ! »

Mais grâce à une communication bienveillante, des panneaux explicatifs, et la présence de bénévoles pour informer sur place, la grande majorité des visiteurs comprend et accepte l’utilité du dispositif.

Et surtout, quand on explique que :

  • Ces clôtures aident à protéger les hippocampes, les herbiers marins, les oiseaux nicheurs
  • Elles permettent de garder un accès libre à la nature, plutôt que de devoir interdire ou réglementer plus lourdement
  • Elles contribuent à préserver la beauté et la qualité de l’expérience de chacun
    …alors les objections fondent comme neige au soleil.

Une gestion adaptée à un usage qui évolue

L’histoire du paddle à la lagune du Brusc est un bon exemple de l’évolution rapide des pratiques de loisir. Ce qui était, en 2014, une activité confidentielle avec du matériel lourd, est devenu en dix ans un phénomène grand public. Cette évolution appelle une gestion fine et réactive des accès à la nature.

Les ganivelles permettent de s’adapter, sans priver le public de ces espaces. Elles rappellent que chaque embarcation a un impact, mais qu’en étant bien orientés, nous pouvons tous profiter sans abîmer.


En résumé

🪵 Les ganivelles sont de simples clôtures de bois, mais aux effets puissants
🚶‍♀️ Elles orientent les visiteurs et protègent les zones sensibles
🛶 À la lagune du Brusc, elles limitent les mises à l’eau sauvages de paddles et kayaks
🌿 Elles contribuent à préserver les herbiers, les berges et la biodiversité locale
🙌 Et surtout, elles permettent de cohabiter intelligemment entre tourisme et nature


Vous aussi, respectez les passages balisés, utilisez les pontons pour mettre à l’eau votre embarcation, et prenez soin de ce lieu unique. Grâce à ces gestes simples, la lagune du Brusc restera un havre pour tous — humains et hippocampes.